Le greenblog de Paul

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Le spectre MONTSANTO

Monsanto est une entreprise dont le siège est situé à Saint-LouisÉtats-Unis et est au xxie siècle spécialisée dans les biotechnologies végétales. Elle a été fondée en 1901 par John Francis Queeny. Originellement entreprise de produits chimiques, son nom est associé à celui des PCB et de l'agent orangemassivement utilisé par l'armée américaine lors de la guerre du Viêt Nam. Détentrice d'un brevet aujourd'hui périmé sur le glyphosate, herbicide total qu'elle commercialise sous le nom de Roundup, Monsanto est également un des principaux producteurs de semences génétiquement modifiées.

L'entreprise a fait et continue de faire l'objet d'enquêtes et d'actions en justice concernant à la fois les produits chimiques ou issus du génie génétiquequ'elle met sur le marché et ses méthodes de lobbying. Elle est accusée de promouvoir des produits nocifs pour la santé et l'écosystème2 et de falsifier les résultats d'enquêtes scientifiques3.

La firme Monsanto accusée de crimes contre l'humanité

Monsanto\=criminels

Durant la guerre du Viêt-Nam, Monsanto s'est enrichi massivement par la fabrication du tristement célèbre défoliant dit Agent Orange. Plus de 4 millions de personnes en ont été victimes. Ses effets sont encore ressentis aujourd'hui, et ce pour des dizaines d'années encore.


Reportage d'Alexis Duclos sur les effets de l'agent Orange au Vietnam

Le samedi 2 avril 2005.


30 ans après la fin de la guerre,
« l'agent Orange » continue d'empoisonner

Texte et photos : ALEXIS DUCLOS
Victime de la dioxine. Photo par Alexis Duclos
A l'école Phan Dinh Phinho tu du, une jeune fille de 10 ans, Pham Thi Thuy Linh, née sans bras, écris sur son livre d'école.

Aujourd'hui, à l'approche du trentième anniversaire de la fin de la guerre du Vietnam, environ 60.000 adultes et plus de 200.000 enfants (1) souffrent toujours de « l'agent Orange » (2). Malformations congénitales, cancers, handicapes physiques et mentaux, sont dans la majorité des cas, la conséquence des plus de 70 millions de litres de défoliants dont le célèbre « agent Orange », déversé au centre et Sud Vietnam de 1961 à 1971 par l'armée américaine. Pays agricole, 20 % du sol vietnamien ont reçu quelque 170 kg de dioxine (3). En plus des combattants de tous bords, la population civile fut durement touchée. À New York, va s'ouvrir le plus grand procès jamais mené aux Etats-Unis contre les responsables du gouvernement et des industries chimiques concernés (4). Les associations de victimes, représentées par des avocats américains, demandent réparations et justice. Les implications et les conséquences sociales, économiques et financières de ce procès sont considérables au regard de la plus grande guerre chimique de l'histoire.

L'Opération « Ranch Hand »

Mme Kan Lay et son fils, Kê Van Bac, devant le panneau dénonçant l'opération Ranch Hand dans la vallée d'A Luoi. Photo Alexis Duclos.
Mme Kan Lay et son fils, Kê Van Bac, devant le panneau dénonçant l'opération Ranch Hand dans la vallée d'A Luoi.

Non loin de la piste Ho chi Minh, Kan Lay, une femme de 55 ans, tiens dans ses bras son fils, Kê Van Bac, un garçon de 14 ans, handicapé physique et mental. Pendant la guerre, Kan Lay vivait dans la région de A Luoi. « J'étais dans la forêt, j'ai vu les avions jeter la poudre sur nous, cela piquait les yeux, brûlait la peau ... » Depuis, son mari et ses trois enfants sont décédés de cancers. Pour les besoins de la photo, ils posent devant le panneau dénonçant l'opération "Ranch hand" (ouvrier agricole) installé sur l'ancien aéroport militaire A Sho, dans la vallée de A Luoi. En effet, c'est en janvier 1962, approuvée par J.F. Kennedy, que l'armée américaine met en place l'opération « Ranch hand ». Des avions à hélices Fairchild C.123 ainsi que des hélicoptères effectuent les missions d'épandages de défoliant sur les montagnes du centre et Sud Vietnam. Une véritable guerre chimique dont les buts sont de détruire toute végétation gênant les bombardements de l'aviation américaine, en particulier sur la piste logistique Hô Chi Minh qui longe la frontière Est du Laos, détruire les récoltes et la végétation pour affamer les Viêtcongs et la population des zones sous leur contrôle. Enfin, la destruction de la forêt permet une meilleure observation et protége les abords des installations militaires des embuscades. Les conséquences à ce jour sont une catastrophe écologique dont les effets rémanents et à long terme de la dioxine touchent environ 60 000 adultes et plus de 200 000 enfants (1), sans parler de la destruction de plus de 2 millions d'hectares de forêt, provoquant l'extinction de la faune et de la flore, la désertification et l'érosion des sols (5).

Contrairement aux applications civiles, « l'agent Orange » est en grande majorité, épandu non dilué. La pulvérisation est de 28 litres par hectare contenant approximativement 5,5 kg de 2,4 D et 6,25 kg de 2,4,5-T. Des milliers de soldats américains, mais aussi alliés, sont contaminés par ces produits. Alors que le Département de la Défense (DOD) américain ne considère pas l'herbicide « agent Orange » comme toxique pour l'être humain, des experts de l'Institut national de la Santé des Etats-Unis révèlent, en 1969, des malformations congénitales chez les animaux de laboratoire. L'opération « Ranch Hand » est seulement arrêtée en 1971... Vingt années durant, pour ne pas avoir à dédommager les anciens combattants malades et-ou parents d'enfants handicapés, certains hauts responsables américains ont occulté, falsifié des rapports scientifiques alarmants concernant la toxicité à long terme des dioxines (6).

Un véritable « Tchernobyl chimique »

À ce jour, les abords de l'ancien aéroport de A Sho sont toujours pollués par la dioxine. Entre 1994 et 2000, les recherches effectuées par le comité 10/80 et l'organisme Canadien "Hatfield Consultants" montrent que cet aéroport est profondément contaminé. Véritable "Tchernobyl chimique", le gouvernement a récemment obligé les habitants à quitter la zone. Élevage et culture sont interdits ; dans la région, les malformations génétiques se comptent par centaines. À la souffrance physique de Kê Van Bac, s'ajoute la charge des soins de l'enfant et le sentiment de culpabilité et d'infériorité pour sa mère.

Victime vietnamienne de la dioxine. Photo Alexis Duclos.
Dans de nombreuses régions où l'armée américaine a déversé des herbicides en quantité, la dioxine reste persistante dans l'environnement et peut frapper les habitants qui vivent dans ces régions.

Hô Van Moi, ancien combattant Vietcong et blessé à la jambe à la suite d'un éclat d'obus, aujourd'hui médecin et directeur de l'hôpital de A Luoi, me raconte d'une façon calme, et sans ressentiment, ses années de guerre alors qu'il était soldat Vietcong. « Avant il y avait la forêt, et puis lorsqu'ils ont déversé les produits, tout est devenu mort ; les arbres, les animaux, et les personnes... À cause de la faim, les gens étaient si faibles qu'ils ne pouvaient pas enterrer les morts... Vous ne pouvez pas imaginer ce que nous avons souffert... Les produits ont été déversés sur les villages, puis sur les collines sous forme de liquide ou bien aussi de poudre... Si la population respirait ces produits, c'était la mort... C'est de la barbarie d'avoir utilisé ces produits chimiques, il faut dire la vérité... » A Luoi compte à ce jour plus de 2000 handicapés dans la région... Plus au Nord, dans la région du Quang Tri, Trân Van Tram, 55 ans, et sa femme Trân Thi Dân, 54 ans, peu après la guerre, partent à la recherche de métaux pour les revendre. Sans le savoir, ils vont travailler dans une zone touchée par les défoliants. Sur sept enfants, quatre, nés après la guerre, sont handicapés physiques et mentaux. Les drames familiaux sont nombreux, comme pour Nguyên Duc Thang, 9 ans, abandonné par ses parents, mais protégé par sa grand mère.

« Eux, ils savent... »

Foetus malformés à l'Hôpital Tu Du, Hô Chi Minh-Ville. Photo Alexis Duclos

 A l'hôpital TU DU de Ho Chi MinhNgyuen Duc, 23 ans, originairement né siamois avec son frère, puis séparé par une opération, pose dans la salle ou des foetus malformés sont gardés dans des jarres.

Le taux de dioxine chez les Vietnamiens du Sud est 900 fois plus élevé que celui des Vietnamiens du Nord (7).

À l'hôpital d'obstétrique et de gynécologie Tu Du, Hô Chi Minh-Ville, sont gardés dans des bocaux de verre des douzaines de fœtus victimes de malformations congénitales dont beaucoup furent causés par « l'agent orange ».
Mme Nguyen Thi Ngoc Phuong, Directrice et Professeur de médecine : « Eux, ils savent... Avec leurs cœurs, avec leurs âmes, ils doivent reconnaître leurs erreurs devant l'opinion internationale et devant le peuple américain... Ils doivent prendre leurs responsabilités pour aider non seulement les Vietnamiens, mais aussi les autres pays impliqués dans le conflit » (Australie, Nouvelle-Zélande, Corée du Sud, Philippines...). À Hô Chi Minh-Ville, le pourcentage des malformations congénitales est supérieur à la moyenne nationale. Les deux tiers des enfants handicapés dont je m'occupe viennent des régions touchées par « l'agent orange ». C'est le cas de Nguyên Duc, 23 ans, né avec deux têtes. Opéré avec succès, Nguyên Duc travaille aujourd'hui à des tâches administratives à l'hôpital Tu Du.

Les docteurs Nguyen Van Hoai et Trân Duc Cuong du centre hospitalier pour enfants victimes de « l'agent orange » de Binh Duong sont des médecins calmes et déterminés. Leurs besoins sont d'ordre matériel et financier. Le docteur Tran Duc Cuong exprime pourtant son sentiment : « Je leur demande de ne jamais refaire ce qu'ils ont fait au Vietnam car les conséquences sont terribles, inimaginables. » Les différents hôpitaux ont besoin de matériel d'échographie en 4 dimensions afin de détecter les malformations. Plus au sud, vers le delta du Mékong, une région elle aussi fortement touchée, Huynh Van Cam, ancien combattant Viêtcong, est à l'origine de la construction d'une école pour les enfants handicapés. C'est un homme calme, posé et prudent. A la fin de notre rencontre, lorsque je lui demande quel est son sentiment, il me regarde dans les yeux et me dit : « Ce qu'ils ont fait est inhumain, et mon souhait le plus cher est que cela ne se reproduise plus jamais... »

Victimes vietnamiennes de la dioxine. Photo Alexis Duclos.

A l'hôpital TU DU de Ho Chi Minh, le célèbre professeur Nguyen Thi Ngoc Phuong, pose avec des enfants handicapés, la plupart victimes de "l'agent Orange".

 

En conclusion, même si la liste des diverses maladies que la dioxine provoque reste à établir, et même s'il est parfois difficile d'obtenir des preuves entre la cause et les effets, des faits indéniables montrent clairement la toxicité redoutable de « l'agent Orange » sur la santé humaine. Les études scientifiques menées par les Américains et les Vietnamiens, mais aussi par la coopération internationale, restent pourtant modestes. Ainsi, 30 ans après la fin de la guerre, le Vietnam reste « un grand laboratoire humain pour l'étude des effets de la dioxine sur la santé humaine ». Au-delà des études scientifiques et des statistiques, ce reportage photographique tente de montrer la souffrance et la détresse d'enfants victimes de la barbarie chimique. Des milliers d'entre eux attendent et espèrent que la justice se prononce pour reconnaître les responsabilités des uns et des autres.(8)

© Texte et Photos : Alexis DUCLOS

http://www.alexisduclos.com

Ce texte, ainsi que les photos qui l'accompagnent, est sous copyright et a été reproduit avec l'autorisation écrite d'Alexis Duclos  www.alexisduclos.com La reproduction en est interdite sans l'autorisation préalable de l'auteur.  Vous pouvez lire un autre article, paru sur notre site, sur le problème de l'agent Orange en cliquant ici. Vous pouvez également accéder au site du Collectif Vietnam Dioxine pour consulter une compilation de liens internet pointant vers des articles scientifiques et autres, en relation avec le problème de la dioxine au Vietnam.



10/12/2009
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